Accueil » De la classification arbitraire… » Autour des scientifiques, l’élite intellectuelle mobilisée » Julien Joseph Virey (1775-1846) : un des premiers naturalistes polygénistes
Né à Hortes près de Langres, Virey commence à travailler dans la pharmacie d’un de ses oncles et devient en 1812, pharmacien en chef des hôpitaux militaires avant de présenter, deux ans plus tard, son doctorat en médecine. Maître d’œuvre du Nouveau Dictionnaire d’Histoire Naturelle de l’Homme publié par Détreville, il publie son œuvre maîtresse en 1801, Histoire Naturelle du Genre Humain.
Il est l’un des premiers naturalistes à formuler la thèse polygéniste en opposant deux espèces fondamentalement différentes aux origines séparées : la première, caractérisée par un angle facial qui s’ouvre de 85° à 90°, très droite, habile, à l’intelligence étendue et à l’industrie supérieure, regroupe les races blanche, jaune, cuivreuse (américaine) et brun foncé (malaise ou polynésienne), la seconde dont l’angle est compris entre 75° et 80°, à peine supérieure à l’orang-outan, à la position du corps un peu oblique, l’air déhanché, l’entendement borné, la civilisation imparfaite, portée au plaisir, comprend les races noires (africaines) et noirâtres (Hottentots, Papous). Si Virey fut très lu par ses contemporains, sa division en deux races ne parut pas toujours pertinente.
De ses études d’anatomie comparée, il conclut évidemment à tort à l’infériorité de la capacité crânienne du Noir. Ce dernier possède un cerveau plus étroit, ses hémisphères cérébraux sont moins volumineux, ses circonvolutions moins nombreuses et moins profondes, son appareil nerveux plus important. La morphologie et la physionomie du Noir sont animalisées, perçues comme voisines de celles de l’anthropoïde.
Cette pensée hiérarchique et inégalitaire n’entraîne pas pour autant une volonté de discrimination. Comme la majorité des naturalistes français, le négrophobe Virey est anti-esclavagiste. Il se distingue ainsi des anthropologues américains tels Josiah Clark Nott, George Robins Gliddon ou encore Samuel George Morton qui, au nom de l’inégalité raciale établie par leurs études craniologiques, prônent le maintien de l’esclavage aux États-Unis.
« Le nègre est et sera toujours esclave ; l’intérêt l’exige, la politique le demande, et sa propre constitution s’y soumet presque sans peine », écrit il à la rubrique « nègre»